Et voilà le cinquième et dernier billet sur les étapes vers l’indépendance financière. Il faut bien que tous ces efforts portent fruit ! Après avoir réduit nos dépenses, augmenté nos revenus, épargné la différence puis investi notre épargne, on arrive assurément quelque part, pas vrai?
Bien sûr, vous l’aurez compris, ce plan n’est pas un get-rich-quick scheme. C’est un plan de longue haleine. On doit appliquer ces principes et maintenir une discipline sur plusieurs années. En revanche, ça représentera aussi plusieurs années en moins à être prisonnier du 9 à 5. Le jeu en vaut la chandelle, mais il faut s’armer de patience et garder le cap.
Éventuellement, votre épargne, le temps et la magie des intérêts composés feront leur œuvre. Un jour, vous atteindrez le montant qui vous permettra, selon la règle du 4 % (ou autre taux de retrait que vous aurez choisi), de couvrir vos dépenses annuelles. Vous n’aurez plus besoin de travailler pour subvenir à vos besoins.
Si vous continuez de travailler, ce sera parce que vous le désirez, et non parce que vous le devez.
Bye-bye, boss!
Personne ne gère cette étape vers l’indépendance financière et la retraite précoce de la même façon. Cependant, trois types de personnes sortent du lot :
- Les pressés n’attendront pas d’atteindre leur chiffre magique à la cenne près. Ceux-ci remettront leur démission dès que possible. Ils trouveront des alternatives pour pallier au manque pour couvrir leurs dépenses. On pourrait même les appeler semi-retraités.
- Les patients attendront d’atteindre leur chiffre magique pour s’assurer que toutes leurs dépenses soient couvertes. Ils n’auront plus à penser à travailler pour de l’argent. Plus jamais.
- Les anxieux, eux, seront plus craintifs de donner leur démission. Et si ça ne fonctionne pas? Et s’ils manquent d’argent? Et si une catastrophe déraille leur plan? Peut-être serait-il mieux de travailler une année de plus, au cas?
Êtes-vous capable de vous retrouver dans une de ces situations?
Peu importe l’attitude que vous aurez, ne perdez pas de vue toute la liberté que l’accumulation de richesse vous apportera.
On fait quoi en cas de catastrophe?
J’ai la conviction que si vous avez la débrouillardise, la discipline et la volonté d’atteindre la liberté financière, vous saurez jongler avec les aléas de la vie de jeune retraité. Cependant, pour les anxieux, il est important de mettre certains systèmes en place pour s’assurer que le plan fonctionne sans accroc.
On ne veut surtout pas d’une correction boursière immédiatement après avoir quitté son emploi. Malheureusement, ça peut arriver. Si votre portefeuille chute de 30 %, vous n’aurez techniquement plus l’équivalent de 25 fois vos dépenses annuelles. Votre pactole risque de s’écouler plus rapidement que prévu.
Il faut donc prévoir le coup avant de « tirer la plogue », puis savoir gérer la crise.
Des pistes de solutions
Alors pour les anxieux, voici quelques stratégies à considérer :
Comment prévenir la crise :
- Choisir un taux de retrait plus « sécuritaire » que 4 %;
- Revoir la composition du portefeuille (ratio actions/obligations);
- Bâtir un fond d’urgence;
- Construire un Yield Shield, qui implique de faire pivoter son portefeuille vers certains titres pour en retirer plus de dividendes pendant les premières années. Ainsi, les dividendes pourront couvrir une plus grande partie des dépenses annuelles et éviteront les ventes à perte pendant une correction boursière.
Comment gérer la crise :
- Réduire ses dépenses autant que possible (le plus près de 4 % de la nouvelle valeur du portefeuille);
- Travailler temporairement;
- Passer la tempête dans un pays où le coût de la vie est moindre (ou comme le disent les auteurs de Millennial-Revolution : “If shit hits the fan, we’re going to Thailand”);
- Éviter de vendre des actions à perte (sell low) et favoriser la vente d’obligations et le retrait de dividendes pour couvrir les dépenses.
Bien sûr, rien n’est jamais blanc ou noir. Il y a évidemment des opinions divergentes sur le sujet. Notamment, le planificateur financier et comptable fiscaliste Ed Rempel remet tous ces concepts conventionnels de la retraite en question dans cet article et offre des stratégies alternatives. 🙂
Si l’idée de donner votre démission et de vivre de vos investissements vous angoisse, même si les calculs sont bons, à vous de prévoir le coup et de vous assurer d’avoir l’esprit tranquille pour faire le grand saut!
En cas de panique, lisez ces paroles pleines de sagesse :
Chaque énigme a sa solution. C’est mathématique. Le tout est de la trouver.
– Capitaine Jean-Luc Picard
Les cadeaux de nos gouvernements
On a maintenant établi un plan à toute épreuve. Nos placements généreront des revenus suffisants pour couvrir nos dépenses pour toujours. Il y a aussi certaines choses intéressantes à ne pas négliger.
Peu importe votre âge à l’indépendance financière (et/ou retraite précoce), vous aurez accès à certains crédits d’impôt remboursables, à condition d’avoir des revenus imposables suffisamment bas.
En 2020, le maximum annuel qu’on peut obtenir du Crédit fédéral pour la TPS/TVH est de 443,00 $ et le maximum du Crédit provincial d’impôt pour solidarité est de 1 015,00 $. On parle donc d’un total de 1 458 $ par année.
Pour générer soi-même ce montant en revenus passifs, ça représente 36 450 $ (1 458 $ x 25) en placements!
Ça ne veut pas dire de se fier là-dessus pour financer sa retraite, mais on peut le voir comme un « bonus » non négligeable.
On ne se fera pas de cachette, nos gouvernements sont très généreux. Ils sont particulièrement généreux avec les familles.
En tant que célibataire sans enfant, je ne suis pas la mieux placée pour exposer l’avantage qu’un faible revenu imposable peut avoir sur les différentes aides gouvernementales aux familles. Cependant, cet article détaillait bien comment l’auteur de Se payer en premier y tire son épingle du jeu.
Les régimes de retraite publics
Maintenant, les différentes sources de revenus auquel vous aurez droit à l’âge traditionnel de la retraite ne seront pas non plus à négliger. Je parle bien sûr du Régime de rentes du Québec (RRQ) et de la Pension de la sécurité de la vieillesse (PSV).
Il est difficile d’estimer à quoi ressemblera ces montants dans plusieurs années, voire décennies. Cependant, la RRQ offre la consultation de notre propre relevé de participation sur son site. Dans la section 3, on y retrouve le montant actuel mensuel. Ce montant représente une estimation de la rente de retraite que vous recevrez à l’âge indiqué, s’il n’y a pas d’autres revenus de travail qui s’ajoutent à ceux déjà inscrits d’ici là.
Le simulateur SimulR est également un outil fort intéressant qui permet de voir à quoi pourraient ressembler les sommes du RRQ et de la PSV aux différents âges possibles (60, 65 ou 70 ans).
En dollars de 2020, le montant mensuel maximum de PSV est de 614,14 $, ou 7 369,68 $ par année. À cela peut s’ajouter le Supplément du revenu garanti (SRV). Toute personne célibataire ayant moins de 18 624 $ en revenu annuel imposable peut aller chercher jusqu’à 917,29 $ de plus par mois, soit 11 007,48 $ par année.
Ainsi, oui, vos placements doivent financer votre retraite pour le restant de vos jours, mais dès l’âge de 60 ans (RRQ) ou 65 ans (PSV), vous aurez la possibilité d’avoir d’autres sources de revenus. À ce moment-là, vous pourriez réduire les retraits de vos placements, car vos dépenses seront maintenant couvertes en partie par ces revenus.
Si vous avez besoin de retirer 4 % de vos placements pendant seulement la moitié de votre retraite, cela favorise les chances que vos placements survivent à votre retraite précoce. 🙂
À moins qu’avec vos pensions, vous choisissiez de dépenser plus. 😉
Encore de l’optimisation fiscale
C’est notamment les différentes sources de revenus mentionnés précédemment qui rendent l’optimisation fiscale si pertinente dès les premiers décaissements.
L’étape du décaissement est un sujet excessivement complexe, qui requiert beaucoup de planification et qui n’a pas de one size fits all. Considérant que je n’ai pas encore atteint l’indépendance financière moi-même, je ne suis pas la mieux placée pour vous dire quoi faire. Cependant, je tiens à vous détailler certaines notions fiscales que je considère comme essentielles.
Dans mon article précédent, j’ai mentionné qu’il était fiscalement avantageux de choisir l’ordre de maximisation des comptes enregistrés. Il sera tout aussi judicieux de bien choisir l’ordre du décaissement, et ce, pour les mêmes raisons.
Puisez dans votre REER immédiatement
On pourrait être tenté de piger dès le départ dans notre beau gros CELI afin d’en retirer un revenu non imposable. Ce serait une erreur.
Si on ne veut pas se retrouver avec une grosse facture fiscale dans le futur, il faudra commencer à décaisser le REER (et/ou CRI) dès le départ. Gardons en tête que le RRQ et la PSV seront imposables. Si on décaisse le CELI dès le départ, on garde les comptes imposables (REER, CRI, compte non enregistré) pour plus tard. Ces comptes financeront la retraite en même temps que le RRQ et la PSV. On s’exposera alors à un taux marginal d’impôt plus élevé.
Également, le REER doit obligatoirement être transféré dans un Fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) à 71 ans au plus tard et un retrait annuel minimum est alors établi en fonction de l’âge. À titre d’exemple, le taux de retrait minimum à 71 ans est de 5,28 % en 2020, donc bien au-delà de la règle du 4 %. Le même principe s’applique au CRI qui doit être transféré dans un Fonds de revenus viagers (FRV). Si vous n’avez jamais retiré de sommes de ces comptes avant ce moment-là, ils seront alors bien fournis et donneront d’importants revenus imposables, auxquels s’ajouteront les revenus du RRQ et de la PSV. Conséquemment, ces revenus seront tous imposables en même temps. La facture fiscale sera salée!
Mr Jack explique parfaitement bien ces notions, à l’aide d’exemple, dans son article Accumuler, décaisser, et payer des impôts (le moins possible).
Le livre Liberté 45 de Pierre-Yves McSween aborde également le sujet dans le chapitre 17 : La liberté fiscale (ou presque). Il appelle cela la « stratégie d’amortissement ou l’art d’étaler ses retraits d’un REER pour réduire son impôt »:
La plupart des gens commencent à décaisser leur REER (c’est-à-dire à retirer de l’argent de leur compte REER) à la retraite, donc en général autour de 65 ans.
Or, à partir de 65 ans, on peut avoir d’autres sources de revenus : Sécurité de la Vieillesse, Régime de rentes du Québec (RRQ, que l’ont peut aussi retarder à 70 ans pour augmenter la rente mensuelle), une partie du régime de retraite accumulé chez un employeur, etc. Donc, plus on retire un montant important de son REER par année, plus on risque de faire monter son taux d’imposition marginal et de perdre des liquidités disponibles nettes d’impôt.
Payez peu ou pas d’impôt
Ainsi, en étalant le retrait de ses REER, il y a moyen de payer presque 0 $ en impôt. En effet, nos généreux gouvernements prévoient un montant personnel d’exemption d’impôt. En 2020, les montants sont établis ainsi :
- Fédéral : 13 229,00 $
- Provincial : 15 532,00 $
Ceux-ci seront amenés à augmenter au fil des années. D’ailleurs, les montants futurs au fédéral sont déjà annoncés :
- 2021 : 13 808 $
- 2022 : 14 398 $
- 2023 : 15 000 $
Ainsi, si on parvient à garder son revenu imposable sous le seuil du montant personnel d’exemption, on paye 0 $ d’impôt. Par le fait même, on maximise les crédits remboursables, les allocations familiales et on touchera éventuellement le SRV à l’âge de la pension! Que du positif, n’est-ce pas?
Bien sûr, si vous projetez avoir des dépenses annuelles plus élevées que les montants personnels d’exemptions, vous aurez un minimum d’impôt à payer. Vous pouvez faire des calculs avec ce simulateur et avoir une idée de votre taux marginal d’imposition en conséquence. Vous pourriez également retirer la balance de votre CELI.
De plus, pendant qu’on vide graduellement le REER et le CRI, le CELI continue à grossir. Plus tard, celui-ci deviendra notre principale source de revenus passifs. Ces revenus seront donc non-imposable, pour toujours. Très pratique quand vient le temps de recevoir le RRQ et la PSV.
La morale de cette histoire? Ne pas faire d’optimisation fiscale, c’est laisser de l’argent sur la table. Vous vous souvenez ce que je pense de laisser de l’argent sur la table, n’est-ce pas?
Mon plan
Premièrement, vous vous demandez sûrement quel est mon « chiffre ». C’est encore un work in progress, car je dois continuer de suivre mes dépenses sur plusieurs mois (même année), pour voir une vraie tendance.
Cependant, j’estime que je serais capable de couvrir mes dépenses essentielles à la retraite avec environ 10 000 $ en dollars d’aujourd’hui. À cela s’ajouteraient des voyages et des activités en tout genre. Je veux quand même faire quelque chose de ma retraite. 😉 J’envisage donc 15 000 $ en dépenses annuelles. Avec la règle du 4 %, j’obtiens 375 000 $ (15 000 $ * 25) comme chiffre magique.
Par contre, je dois considérer l’inflation (moyenne de 2 %) dans mon calcul. Mon objectif étant mes 35 ans, au plus tard, je dois prévoir jusqu’en 2026.
Donc en 2026 au plus tard, j’aurais besoin de 422 300 $ en placement pour couvrir 16 892 $ en dépenses annuelles.
Par ailleurs, ce chiffre comprendra la valeur transférable de mon RRPD que j’encaisserai après avoir donné ma démission. J’estime cette valeur autour de 100 000 $ en 2026.
C’est à ce moment-là que je devrai commencer à décaisser mes placements. Après des années à accumuler, ça risque de faire drôle!
À ce moment-là, je considère appliquer certaines stratégies pour optimiser le décaissement. Les voici, dans le désordre :
- Maximiser mon rendement au long terme avec une proportion d’actions élevées;
- Utiliser la Bucket Strategy pour les premières années;
- Décaisser mon REER et mon CRI prioritairement jusqu’au montant personnel d’exemption;
- Optimiser les dépenses d’habitation avec l’arbitrage géographique;
- Optimiser les dépenses de voyages avec le Travel Hacking.
Voilà. C’est encore très brouillon. Je vais sûrement faire un billet entier sur le sujet, car certains points sont déjà plus élaborés que d’autres dans mon plan. Présentement, je m’informe beaucoup sur des stratégies alternatives comme celles d’Ed Rempel. Donc, rien n’est coulé dans le béton. J’ai encore 6 ans devant moi pour me préparer et élaborer un plan à toute épreuve.
Advienne que pourra
Dites-vous que la vie d’un travailleur n’est pas non plus sans embûche. S’il faut bien tirer une leçon de 2020, c’est que personne n’est à l’abri d’une mise à pied, d’un licenciement, d’une faillite ou, bien sûr, de la maladie. Bien des gens vivent des difficultés financières importantes et doivent jongler avec ces réalités et trouver des solutions.
La vie du retraité précoce aura également son lot d’obstacles. Si le worst-case scenario, c’est de devoir se serrer la ceinture, partir en Thaïlande (voyez ce comparateur du coût de la vie entre Québec et Chiang Mai) ou de retourner travailler temporairement, il y a définitivement pire. Tout est une question de point de vue.
La meilleure façon de s’assurer d’un avenir financier confortable sur plusieurs décennies, c’est d’avoir un plan solide et de revoir sa stratégie régulièrement.
Notre espèce ne saura survivre que si nous avons des obstacles à surmonter.
– Capitaine James T. Kirk
Cela conclut donc ma série de billets sur les étapes vers l’indépendance financière. J’espère que ça vous a plu et que vous aurez appris quelque chose! L’idée étant de vous donner un maximum d’information pour vous donner envie de passer à l’action. 🙂
J’ai déjà une multitude d’idées pour mes prochains billets, alors stay tuned!