Comme promis, voici mon premier billet d’une série de cinq qui porteront sur les étapes vers l’indépendance financière. Commençons par la base, c’est-à-dire la réduction des dépenses.
Je commence déjà à vous perdre, hein? Au Québec, on a si peur d’avoir l’air cheap ou de se faire traiter de Séraphin, qu’on dépense à tout vent. La preuve : l’endettement moyen des ménages en 2018 se chiffrait à 170 %. Vous comprenez, comme moi, que cela veut dire que pour chaque 1 $ de revenu disponible, on en dépense 1,70 $. C’est complètement dément!
De plus, ces gens endettés vous diront à quel point ça irait mieux s’ils gagnaient plus d’argent. Pourtant, quand vient l’augmentation de salaire ou la promotion, que font ces gens? Au lieu d’essayer de se sortir de l’endettement ou d’épargner, ils dépensent plus. Ils s’achètent une voiture financée. Ils partent dans le sud sur la carte de crédit. Ils s’achètent un cinéma maison payable sur 36 mois. Ils se retrouvent donc à nouveau pris à la gorge, sans aucune marge de manœuvre, et ils attendent déjà la prochaine augmentation.
Alors qu’en fait, il faudrait commencer par appliquer un concept très simple : dépenser moins que l’on en gagne. La statistique citée plus haut confirme malheureusement que les gens dépensent (bien) plus que ce qu’ils gagnent.
Par où commencer
Maintenant qu’on a établi que gagner plus ne règle pas le problème à lui seul, passons aux choses sérieuses. Et si l’on commençait par réduire nos dépenses? Quand on y pense, c’est logique. Chaque 100 $ qu’on ne dépense pas représente 100 $ de plus dans nos poches. En revanche, travailler plus pour obtenir 100 $ supplémentaires représente réellement 60-70 $ après impôts et déductions, en plus de vous avoir coûté de votre précieux temps. Pas difficile de voir quelle méthode est la plus efficace.
Alors, on réduit quelles dépenses? Comme le disait récemment Daniel Germain dans son article L’épargne, une déclaration d’indépendance! :
« Ça ne veut pas dire de renoncer à une auto, à une maison, à des enfants, à un chat et à une tondeuse. Ça ne signifie pas non plus de faire une croix sur le fun. Au contraire : l’indépendance, c’est savoir reconnaître ce qui nous procure du vrai plaisir, et non des illusions et des déceptions. L’essentiel, quoi. »
Et pour cibler l’essentiel dans nos dépenses, il faut premièrement savoir où va notre argent. C’est bien beau un budget de coin de table où l’on y additionne nos dépenses fixes, on estime à peu près le reste et on présume que ça représente bien la réalité. Cependant, avez-vous déjà réellement pris la peine de suivre chacune de vos dépenses? Je dis bien chacune. Chaque café matinal au service au volant, chaque 50 $ à l’épicerie alors qu’on allait « juste chercher du lait », chaque billet de loterie acheté en payant l’essence, et j’en passe.
Si vous voulez tenter l’exercice du suivi de vos dépenses, je vous invite à lire mes bilans mensuels pour voir à quoi ressemble mon propre suivi de dépenses.
Il est temps de faire le ménage!
Une fois cet exercice fait, il vous sera beaucoup plus facile de cibler ce qui peut être éliminé ou optimisé. C’est un peu comme le principe que Marie Kondo applique au rangement : on ne garde que ce qui nous apporte de la joie et on se débarrasse du reste.
Ça vous apporte de la joie de payer 100 $ par mois pour votre forfait cellulaire? Non. Alors, changez de fournisseur pour celui qui offre un meilleur prix.
Ça vous apporte de la joie de savoir que votre voisin paye 50 $ moins cher que vous pour le même service de télé? Non. Alors, appelez votre fournisseur et négociez un prix à la baisse (ou annulez simplement le service, car est-ce vraiment essentiel?).
Ça vous apporte de la joie de voir vos primes d’assurance auto augmenter d’année en année? Non. Alors, demandez des soumissions auprès d’autres compagnies, augmentez vos franchises et revoyez la pertinence d’être assuré « des deux bords ». Pour de plus amples conseils à ce sujet, allez jeter un coup d’oeil à cet article.
Ça vous apporte de la joie de voyager? Ah bien là, oui! La facture, elle? Un peu moins. Alors, informez-vous sur le travel hacking (ou comment économiser grâce aux points de cartes de crédit).
Une fois chaque poste de dépense passé au crible puis optimisé, on constate rapidement la liquidité supplémentaire à la fin du mois et de l’année.
Mes dépenses
Alors c’est bien beau tout ça, mais à quoi ça ressemble, des dépenses optimisées? Je ne prétends pas avoir un niveau de dépense parfait, loin de là, mais j’ai déjà fait un certain travail d’optimisation au cours des dernières années et je tenais à vous partager le résultat. De plus, parfois on ignore simplement que le prix pour un service X est beaucoup plus élevé que nécessaire, sans point de référence. Alors, peut-être qu’en comparant vos dépenses avec les miennes, cela vous incitera à faire quelques téléphones.
Présentement, mes dépenses relativement fixes ressemblent à ceci :
Poste de dépense | Montant | Annualisé |
Habitation – Loyer – Assurance habitation |
497,50 $/mois 14,48 $/mois |
5 970,00 $ 173,76 $ |
Voiture – Paiement – Assurance auto – Essence – Immatriculation – Changement d’huile – Permis |
403,85 $/2 semaines 48,12 $/mois 10,00 $/semaine 227,57 $/année 100,00 $/6 mois 86,34 $/année |
10 500,10 $ 577,44 $ 520,00 $ 227,57 $ 200,00 $ 86,34 $ |
Nourriture – Épicerie |
50,00 $/semaine |
2 600,00 $ |
Abonnements – Cellulaire – Hydro-Québec – Internet résidentiel – Spotify – Netflix |
31,57 $/mois 29,50 $/mois 28,75 $/mois 7,15 $/mois 7,00 $/mois |
378,84 $ 354,00 $ 345,00 $ 85,80 $ 84,00 $ |
Dons – CanaDon |
10,00 $/mois |
120,00 $ |
Chats – Nourriture – Litière |
30,00 $/mois 20,00 $/mois |
360,00 $ 240,00 $ |
Total : | 22 822,85 $ |
Cela n’inclut pas les dépenses impulsives, imprévues ou exceptionnelles, mais ça donne un bon portrait. Si certains montants vous semblent anormalement bas, vous devez comprendre que je vis en colocation dans un 4 et demi avec ma sœur. On se partage ainsi la majorité des dépenses. Si j’avais décidé de vivre seule, j’assumerais la totalité des dépenses. C’est un choix financier qui me permet de diminuer mes dépenses considérablement.
Vous comprenez qu’avec 22 822 $ de dépenses annuelles et un revenu net qui devrait atteindre 49 000 $ à la fin de l’année, ça laisse une excellente marge de manœuvre (26 178 $) pour l’épargne et les autres dépenses.
Mes possibilités d’optimisation
Bien sûr, il y a toujours matière à optimisation dans la vie. En voici quelques exemples.
Mon poste de dépense pour la voiture est excessivement élevé présentement, mais s’optimisera de lui-même à l’échéance de mon prêt automobile en novembre 2021. Comme je le mentionnais dans mon bilan de septembre 2020, j’ai augmenté mes versements au maximum permis par l’institution financière pour le rembourser plus vite. Cela représente présentement une dépense de 10 500 $ par an, ce qui est énorme (46 % de mes dépenses fixes). Cependant, cela veut aussi dire qu’une fois la dette réduite à néant, mes dépenses annuelles fixes chuteront alors à 12 322 $!
Mon logement représente un autre poste de dépense majeur sujet à optimisation. Il est déjà relativement optimisé considérant que je vis en colocation, plutôt que seule, ce qui me permet de bénéficier d’une certaine économie d’échelle. Le prix actuel de mon loyer me semble assez avantageux en comparaison avec une hypothèque sur une copropriété ou une maison unifamiliale et les frais afférents. Toutefois, déménager plus loin de mon travail serait une optimisation supplémentaire. À l’ère du télétravail, je ne peux m’empêcher de réévaluer la pertinence de payer pour être près de mon lieu de travail, alors que je n’y ai pas mis les pieds en sept mois. Même dans un monde post-COVID, il serait bien surprenant que j’y retourne plus que deux jours par semaine.
Bien sûr, demeurer à proximité de mon travail sera inutile une fois financièrement indépendante. À ce moment-là, ce poste de dépense devra être optimisé via l’arbitrage géographique, si ce n’est pas déjà fait. 🙂
La règle du 4 %
Si j’insiste sur cette première étape, c’est parce qu’il s’agit vraiment de la base si on aspire vraiment à l’indépendance financière. On aura beau gagner 200 000 $ par an, si on le dépense au complet, ou pire à 170 %, on n’a aucune marge de manœuvre. Comme on dit, c’est « le nerf de la guerre ». Rappelons-nous que l’objectif, ici, est de pouvoir retirer suffisamment d’argent de nos placements pour couvrir nos dépenses annuelles. Ainsi, moins nous avons de dépenses, moins nous avons besoin de retirer d’argent et donc, moins nous avons besoin de placements!
C’est en fait sur les dépenses, et non le revenu, que doit se baser la règle du 4 %. Jamais entendu parler de la règle du 4 %? Dans ce cas, laissez-moi vous diriger vers d’excellentes ressources sur le sujet :
- How Much is Enough? par Millennial-Revolution
- La règle du 4 % par Retraite 101
- Mon plan pour la retraite par Jeune Retraité
- The 4% Rule: The Easy Answer to “How Much Do I Need for Retirement?” par Mr. Money Mustache
Bref, il s’agit du taux de retrait de nos placements que les experts considèrent comme sécuritaire. Ainsi, pour savoir combien nous avons besoin en placements pour couvrir nos dépenses (déjà préalablement calculées) à un taux de retrait de 4 %, il faut faire le calcul inverse (100 / 4 = 25). Cela revient donc à multiplier nos dépenses annuelles par 25.
Alors, si on reprend mes dépenses annuelles mentionnées plus haut, à titre d’exemple, on arrive à ceci :
22 822 $ * 25 = 570 550 $
Ce qui veut dire que pour couvrir mes dépenses annuelles (qui incluent les versements sur mon prêt automobile), j’aurais besoin de 570 550 $ en placements. En revanche, une fois mon prêt automobile remboursé, le calcul ira comment suit :
12 322 $ * 25 = 308 050 $
Vous voyez l’énorme différence? J’aurai alors besoin de 262 500 $ de placement en moins pour couvrir mes dépenses à un taux de retrait de 4 %! Vu sous cet angle, l’indépendance financière semble beaucoup plus accessible, n’est-ce pas?
Pour avoir une idée de ce que représente réellement un poste de dépense dans votre quête vers l’indépendance financière, je trouve toujours pertinent de calculer le montant nécessaire en placements pour couvrir la dépense en question. Par exemple, votre cellulaire vous coûte 100 $ par mois, soit 1 200 $ par an. Avec notre petite règle, on comprend que vous aurez besoin de 30 000 $ en placements seulement pour régler votre facture de cellulaire. Si on parvient à réduire notre facture de cellulaire à 50 $ par mois, on a alors besoin que de 15 000 $ en placements. De quoi faire réfléchir. 🙂
On comprend mieux maintenant pourquoi j’insiste sur la réduction des dépenses, n’est-ce pas?
La règle du 4 % n’est bien sûr pas complètement infaillible. Il y a beaucoup de facteurs à considérer, notamment l’âge de la retraite, l’espérance de vie, la composition du portefeuille, la tolérance au risque, etc. Certains pourraient vouloir utiliser un taux de retrait plus conservateur comme 3 % par exemple. Il faut, à ce moment-là, prévoir des placements qui équivalent à 33 fois ses dépenses annuelles. Cependant, je considère que la règle du 4 % est une bonne règle générale pour avoir une idée de notre objectif. À partir de là, il revient à chacun de faire ses propres calculs selon sa situation et ses besoins.
Il faut passer à l’action
Bien sûr, on ne passe pas d’un taux d’endettement de 170 % à un taux d’épargne de 50 % du jour au lendemain. C’est un travail de longue haleine. Chaque geste posé à un effet cumulatif dans le temps (comme l’intérêt composé!). Alors une chose à la fois, mais l’important est de passer à l’action. Le plus tôt vous commencez à réduire vos dépenses, le plus rapidement vous vous rapprocherez de vos objectifs. Après tout, Rome ne s’est pas bâti en un jour.
Sur ce, je vous laisse sur un passage du dernier livre de Pierre-Yves McSween, Liberté 45, qui m’a particulièrement interpellé :
Le chemin vers la liberté financière est simple en principe. En pratique, il faut une volonté de fer pour ne pas bifurquer de la trajectoire. Il faut surtout transformer le faux sentiment de privation en impression positive, celle que fait naître la quête de la liberté. Tout est là. Ce n’est pas se priver que de chercher à quitter la prison de la course à la folie du rien. Il faut juste changer de lunettes, laisser son voisin aller travailler dans son VUS à 50 000 $ pendant qu’on prépare secrètement sa sortie de prison. Sans frais.
Bye-bye, voisin! Je m’en vais au chalet… pour toujours!
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14 octobre 2020 at 17:27
Wow, super bel article ! Tu auras ta place parmi les blogueurs québécois, ça c’est certain ! En plus, une femme sans enfants, on est pas beaucoup sur la blogosphère ;)! Hâte de lire ton cheminement !
14 octobre 2020 at 20:10
Bonjour Sorcière Frugale!
Merci d’avoir pris la peine de commenter, c’est vraiment apprécié! Et merci pour l’accueil dans la blogosphère. 🙂 En effet, il est parfois difficile de trouver des modèles qui se collent à notre réalité de femme sans enfant. On est comme une anomalie dans le système. Alors, pourquoi ne pas y mettre mon grain de sel? 🙂
Au plaisir d’échanger!
15 octobre 2020 at 09:24
Bel article! Par contre, le taux d’endettement n’est pas équivalent à taux de dépenses. Il y a une bonne définition dans l’article de La Presse.
13 juin 2021 at 20:43
Bonjour,
Merci pour ce super blog et toute l’énergie investie dedans! Je suis locataire et je pensais avoir une assurance habitation peu chère (26$ par mois pour 2 personnes); votre 15$ me fait envie, avec quelle compagnie êtes-vous?
Bonne soirée/journée.
13 juin 2021 at 22:01
Bonjour et merci pour votre commentaire! 🙂
Je suis assurée chez Intact, mais ça vaut la peine de magasiner un peu partout. Les assureurs de dommages ont tous des expériences et critères différents qui fait fluctuer le calcul des primes énormément d’une compagnie à l’autre. Ça vaut vraiment la peine d’obtenir des soumissions un peu partout et de choisir le meilleur offrant!
Avant d’arrêter mon choix chez Intact, j’ai obtenu au-dessus d’une dizaine de soumissions. 😉
Réévaluer ses besoins et augmenter ses franchises est aussi une excellente façon d’obtenir un meilleur prix. Il faut juste être prêt à débourser plus de sa poche lors d’un éventuel pépin.
Bonne chance!